Comme tous les risques naturels, le risque volcanique résulte du croisement entre un aléa (le phénomène naturel) et la présence d’un enjeu plus ou moins vulnérable (populations, infrastructures, activités économiques, etc.) dans une zone potentiellement menacée par l'aléa. Le risque volcanique est un risque naturel majeur, à cause de la violence des aléas, des difficultés à prévoir les éruptions, et de l’accroissement constaté de la population et/ou des équipements à proximité immédiate des volcans.
Les éruptions volcaniques sont des phénomènes très singuliers : alors qu’un séisme ne dure que quelques minutes, un cyclone quelques jours, certaines éruptions volcaniques peuvent durer des années et impacter de manière durable un territoire. Les volcans sont en outre capables de produire des aléas très différents et susceptibles de changer brusquement en fonction du type d'édifice et/ou d'éruptions.Les périodes de repos plus ou moins longues entre deux éruptions (parfois de plusieurs siècles) empêchent parfois le développement d’une culture du risque adéquate. Le risque volcanique est ainsi propre à un édifice donné, et varie dans le temps et dans l’espace : chaque volcan est donc spécifique.
Qu'est ce qu'un volcan ?
Les volcans se forment lorsque du magma (un mélange de roches en fusion -la lave-, de gaz et d’éléments solides) est émis à la surface de la Terre. On parle alors d’éruption volcanique. La plupart des volcans forment des reliefs généralement coniques, plus ou moins pentus, qui se construisent par accumulation successive de lave et/ou de matériel bréchique autour du point de sortie principal.
Les volcans peuvent être terrestres ou sous-marins et leur répartition à la surface du globe n’est pas aléatoire : elle est régie par le principe général de la tectonique des plaques et des points chauds. La carte ci-dessous présente les volcans actifs dans le monde :
Stratovolcans et volcans boucliers
Lorsque cette accumulation de matériel volcanique se fait progressivement, au cours de nombreuses éruptions successives sur une longue période de temps, on parle alors de :
- stratovolcans : lorsque les coulées de lave alternent avec l'émission de grandes quantités de brèches et de roches pyroclastiques, comme par exemple à la Montagne Pelée, à la Soufrière de Guadeloupe, au Sancy ou dans le Cantal ;
- volcans-boucliers : lorsque les coulées de lave fluide forment la majeure partie du volcan, comme par exemple au Piton de la Fournaise.
Edifices monogéniques
Lorsque l'accumulation de lave et/ou de matériel pyroclastique se fait au cours d’une seule éruption, sur une période de temps relativement courte, on parle alors d’édifices monogéniques (littéralement « créés en une fois », comme par exemple les volcans de la Chaîne des Puys en Auvergne). Ces derniers peuvent prendre la forme de cônes de scories, de dômes, voire de cratères de maar (quelquefois remplis d’eau).
Edifices sous-marins
Les volcans peuvent se former à terre ou en mer, au niveau du plancher océanique. Dans ce dernier cas une colonne d’eau plus ou moins importante recouvre alors le volcan en formation. D’un point de vue géologique les situations sont complètement comparables et les mêmes types de volcans peuvent se former à terre ou en mer. En revanche les effets des éruptions sont très différents du fait de la présence d’eau. Les volcans sous-marins présentent en général moins de risques directs car par exemple les populations sont par définition plus éloignées ou les gaz émis peuvent se dissoudre dans l’eau mais ils ne sont pas sans risque et peuvent également être sources d’aléas spécifiques :
- la génération de tsunami volcanogénique, pouvant toucher des îles habitées, même si la source est une île inhabitée ou un volcan sous-marin ;
- la possible perte de portance des navires circulant à l’aplomb d’un panache volcanique sous-marin : la présence de grande quantité de bulles et de gaz volcanique pouvant en effet diminuant fortement et brutalement la densité de l’eau de mer (allant potentiellement jusqu'à provoquer des naufrages) ;
- la génération de « radeaux de ponces », résultant d’éruptions ayant lieu au niveau du plancher océanique, parfois par plusieurs kilomètres de fond. Ils sont composés de roches très vésiculées (les "pierres ponces") possédant une densité très faible (inférieure à 1) qui leur permet de flotter à la surface de l’eau et de s’étaler sur de grandes superficies. Ces radeaux de ponces sont corrosifs et peuvent perturber la navigation maritime sur des centaines de kilomètres. Ils peuvent généralement être suivis par imagerie satellitaire.
Les différents aléas volcaniques et leurs effets
Les volcanologues dénombrent aujourd’hui sept grandes familles d'aléas volcaniques (auxquels s’ajoutent les séismes d’origine volcaniques), schématisés sur l'illustration ci dessous. Tous les édifices ne sont cependant pas concernés par ces sept aléas, qui varient en fonction du type de volcan et de son comportement, du type d'éruption, de son contexte géologique et de sa situation géographique. Différents aléas peuvent par contre se succéder (parfois de manière brusque) au cours d'une même phase éruptive.
Les coulées (et les dômes) de lave
Les coulées de lave sont des épanchements de roche en fusion qui se mettent en place sur les flancs des volcans sous l’effet de la gravité. La capacité de la lave à s’écouler dépend :
- de ses paramètres physico-chimiques (température, chimie, viscosité, etc.) ;
- du débit éruptif au niveau de sa source ;
- de la nature et de la morphologie des terrains sur lesquels elle s’écoule (pente et rugosité) ;
- de sa capacité à être confinée dans une vallée, un chenal et/ou un tunnel de lave.
L’ensemble de ces paramètres vont déterminer la vitesse de mise en place de la coulée et la distance qu’elle pourra parcourir. La température d’émission de la lave varie entre 700°C et 1200°C (en fonction du type de lave), et les vitesses de mise en place ont tendance à fortement diminuer sur pente faible et/ou à mesure que l’on s’éloigne de la bouche éruptive.
Les laves les plus visqueuses ne peuvent quasiment pas s’écouler : elles s’accumulent ainsi au-dessus de leur point de sortie et forment alors des dômes qui obstruent parfois le conduit magmatique, entraînant une pressurisation du système pouvant conduire à des explosions violentes, produisant alors d’autres aléas.
La vitesse de déplacement relativement faible des coulées de lave laisse généralement le temps aux populations et aux animaux de se mettre en sécurité en cas de menace (sauf cas exceptionnels). Les victimes directes les plus fréquentes des coulées sont des personnes s’approchant trop près, sans conscience du danger. Des feux peuvent par ailleurs être déclenchés à proximité des coulées et se propager à la végétation ou aux constructions aux alentours.
En se refroidissant, les coulées de lave se figent et forment des niveaux plus ou moins épais de roche très dure (alternant avec des niveaux plus fins de brèches scoriacées). Les terrains affectés par des coulées peuvent ainsi se retrouver ensevelis sous plusieurs mètres (voire plusieurs dizaines de mètres) de roche dure, selon le type de lave impliquée dans l’éruption et la géométrie du relief pré-éruptif.
Il est ainsi souvent difficile de conserver ou de restaurer l’utilisation pré-éruptive d’un terrain recouvert par une coulée de lave (culture devenue impossible, déblaiement et reconstruction complexe, etc.). La forte température des coulées et leur avancée à la manière de « chenilles de char » se traduisent la plupart du temps par la destruction de tout élément statique situé sur leur trajet (bâtiments, infrastructures, réseaux, cultures, etc.).
Les retombées aériennes de bombes et de cendres volcaniques
Les éruptions volcaniques sont souvent accompagnées d’explosions. Ces explosions sont provoquées par l’expansion brutale des gaz contenus dans le magma, qui se fragmente alors au cours de sa remontée dans le conduit volcanique. Une grande quantité de particules volcaniques de toute taille (blocs, cendres, etc.) est alors éjectée dans un jet de gaz, généralement vertical : il s’agit des panaches volcaniques. Le comportement de ces particules volcaniques varie en fonction de leurs tailles respectives :
- les bombes volcaniques désignent les particules les plus grossières (possédant un diamètre supérieur à 6,4 cm) qui sont éjectées du cratère et retombent tout autour en suivant une trajectoire balistique ;
- les retombées de cendre et de lapillis désignent les particules de taille intermédiaire (entre 2 mm et 6,4 cm pour les lapillis) à fine (inférieure à 2 mm pour les cendres) qui sont initialement incorporées dans le panache volcanique, puis sont transportées latéralement par les vents dominants, avant de retomber au sol par gravité et/ou sous l’effet des précipitations. Les panaches volcaniques sont capables d’atteindre des altitudes considérables (> 40 km), et les particules volcaniques peuvent voyager dans l’atmosphère sur des centaines voire des milliers de kilomètres avant de se déposer, surtout pour les plus fines, appelées « cendres volcaniques ». Ces cendres sont principalement composées d’échardes de verre volcanique et de petits cristaux ;
- les particules les plus fines et les aérosols volcaniques injectés en haute atmosphère par des éruptions violentes peuvent rester en suspension pendant des années avant de sédimenter. Ces éléments peuvent même avoir un impact immédiat sur le trafic aérien ou à plus long terme sur le climat (refroidissement) en réfléchissant une partie du rayonnement solaire.
Les bombes volcaniques peuvent créer des dégâts (par impacts) jusqu'à plusieurs kilomètres du volcan. Elles forment des cratères d’impacts parfois importants et peuvent déclencher des incendies si elles sont encore incandescentes lorsqu’elles retombent.
Lorsqu’elles sont en suspension dans l’atmosphère, les cendres représentent une grande menace pour le trafic aérien (détérioration des moteurs, abrasion des verrières de cockpit, etc...).
Une fois retombées au sol, les cendres forment des couches homogènes et uniformes qui recouvrent tout le paysage, et dont l’épaisseur a globalement tendance à diminuer au fur et à mesure que l’on s’éloigne du volcan. Ces dépôts entrainent la destruction des cultures et les pâturages. L'inhalation de cendres est particulièrement irritante et peut provoquer d'importants troubles respiratoires.
L’accumulation de cendres sur les toits des bâtiments peut entrainer leur effondrement. Le poids des dépôts de retombées dépend de leur épaisseur, de leur nature, de leur granulométrie, et du taux d’humidité.
Les dépôts de cendres, même très fins (quelques millimètres d’épaisseur), sont facilement re-mobilisables et peuvent se muer en nuages persistants qui limitent la visibilité (ex : trafic routier), s’insinuent dans les moteurs des véhicules, les réseaux électriques et les bâtiments. Ils peuvent ainsi considérablement ralentir d'éventuelles opérations d'évacuation. Les cendres ont aussi la capacité de contaminer des réserves d'eau potable (AEP) non protégées (ex : citerne à l'air libre).
Les coulées pyroclastiques
Les coulées pyroclastiques (anciennement appelés « nuées ardentes ») sont des mélanges complexes de gaz et de fragments de roches à haute température (250 – 800 °C) qui se mettent en place en dévalant les flancs des volcans.
Ces coulées sont capables de se déplacer à des vitesses considérables (de 20 à 700 km/h) sur des distances importantes (de 1 à près de 50 km), de franchir de hauts reliefs (crêtes, collines, etc.), voire de traverser des lacs.
Les coulées pyroclastiques sont en outre capable d’éroder et d’incorporer les terrains sur lesquels elles se déplacent, se renforçant ainsi au cours de leur mise en place. Ces phénomènes très complexes peuvent se former au cours de différents types d’éruptions, que l’on peut regrouper autour de trois grands mécanismes :
- la survenue d’une explosion violente, parfois dirigée latéralement ;
- l’effondrement d’un panache volcanique sur lui-même ;
- la déstabilisation gravitaire d’un dôme de lave en croissance.
La température et la vitesse importante des coulées pyroclastiques, leur importante charge en particules, la pression dynamique et la raréfaction de l’air lors de leur passage font de ce phénomène complexe l’aléa volcanique le plus meurtrier des XXème et XXIème siècles.
Les impacts les plus forts se situent généralement dans les zones situées à proximité immédiate du passage de la coulée ou de la déferlante pyroclastique. Ces coulées peuvent parcourir plusieurs dizaines de kilomètres depuis leur source. Des nuages de cendres (appelés "co-pyroclastiques") sont la plupart du temps associés aux coulées. Les coulées pyroclastiques ont un fort pouvoir destructeur, autant sur le vivant (brûlures, asphyxie, etc.) que sur les infrastructures (bâtiments, réseaux, etc.), les pâturages ou les cultures.
Les dépôts associés aux coulées pyroclastiques sont variables : ils vont de quelques centimètres de matériel fin (« cendreux ») pour le pôle le plus dilué et turbulent des coulées (appelé alors "déferlante pyroclastique"), jusqu’à des épaisseurs de plusieurs dizaines de mètres de matériel bréchique grossier hétérogène charriant des blocs de plusieurs mètres de diamètre pour le pôle le plus concentré (appelé alors "écoulement pyroclastique"). Ces dépôts ont tendance à être concentrés dans les dépressions topographiques (vallées), qui peuvent parfois être entièrement comblées.
Les lahars (coulées de boues/coulées de débris)
Les lahars (terme d’origine indonésienne) sont des coulées de boue ou de débris constituées d’un mélange d’eau et de matériel volcanique. Ils peuvent se former de manière directe (par exemple lorsque qu’une éruption a lieu sous un glacier) ou de manière indirecte (par exemple lorsque de fortes pluies remobilisent des dépôts volcaniques non consolidés).
Ils ont la capacité d’éroder les terrains sur lesquels ils se déplacent et de grandir au cours de leur mise en place. Ils possèdent un front très compact et sont capables de se déplacer à des vitesses de l’ordre 20-100 km/h sur de très grandes distances.
Généralement bien canalisés dans les vallées les plus encaissées, les lahars peuvent déborder en plaine et inonder de vastes surfaces aux débouchés des vallées. Ils sont particulièrement fréquents sur les volcans explosifs situés en milieu tropical, où la présence de quantités importantes de matériel volcanique fragmenté (brèche, téphras) et de fortes précipitations forment une combinaison qui leur est particulièrement favorable.
Les dégâts potentiels associés aux lahars dépendent de leurs propriétés physiques, de leur vitesse et de leur volume, ainsi que de la topographie des chenaux dans lesquels ils se mettent en place. Ils suivent généralement le lit des rivières existantes, surtout si elles sont encaissées, et ont la capacité à largement déborder en plaine. Les points topographiques bas et proches des cours d'eau sont ainsi à évacuer rapidement en cas d'alerte, les lahars pouvant se déplacer à une vitesse importante.
Tout comme pour les coulées de débris non-volcaniques, les blocs métriques charriés par les lahars peuvent causer d’importants dégâts par impacts sur les bâtiments et les infrastructures. L'ensevelissement des terres arables entraine la destruction des cultures et/ou des pâturages.
D’importants phénomènes d’érosion du sol et/ou des berges peuvent se produire lors du passage des lahars, et entrainer la perte d'infrastructures et/ou bâtiments situés trop près des rivières. Les dépôts associés aux lahars forment des couches généralement épaisses de matériel hétérogène composé de fragments volcaniques de toutes tailles englobés dans une matrice boueuse qui se solidifie avec le temps. Il est parfois difficile de retrouver l’utilisation pré-éruptive d’un terrain recouvert par une épaisseur importante de lahars. Ces dépôts peuvent parfois entièrement combler des vallées.
Les émissions de gaz
Le dégazage est une manifestation importante de l’activité volcanique, que ce soit lors d’éruptions (où le gaz est alors le moteur du phénomène, notamment lors des éruptions explosives), ou lors de période de repos (où les gaz s’échappent alors de façon localisée via les fumerolles ou les sources hydrothermales, ainsi que de de façon plus diffuse au travers du sol).
Les différents constituants des gaz volcaniques sont, par ordre d’abondance : l’eau (H2O, jusqu’à 95%), le dioxyde de carbone (CO2), les espèces soufrées (SO2, H2S), les gaz acides (HCl et HF) et des constituants mineurs (azote N2, radon et autres gaz rares, CO, CH4, H2). L’interaction entre ces gaz (et/ou des cendres sur lesquelles ils ont pu se condenser) et l’atmosphère peut entraîner la formation de pluies acides (notamment par combinaison des espèces soufrées avec l’eau de pluie). L’injection de grande quantité de gaz dans la haute atmosphère (stratosphère) entraine des modifications complexes et durables qui peuvent avoir un impact à long terme sur le climat.
L'impact des gaz volcaniques dépend des concentrations présentes dans l'atmosphère et de la durée d'exposition. Certains gaz volcaniques (notamment le dioxyde de soufre, SO2) peuvent interagir avec l’atmosphère et produire des pluies acides, ayant des impacts importants sur la végétation, les cultures et les pâturages.
Les gaz plus lourds que l’air se concentrent dans les creux topographiques et les points bas, où ils se substituent à l’air pour former des pièges invisibles, parfois mortels (risque d’asphyxie). Les gaz volcaniques en tant que tels ne forment pas de dépôts, mais la cristallisation (ou la sublimation) de minéraux particuliers (par exemple de cristaux de soufre) et l’altération importantes des roches hôtes trahissent souvent la présence de points d’émission de gaz. Ces environnements sont souvent fortement corrosifs.
A plus grande échelle, la présence de grande quantité de gaz, aérosols et particules volcaniques éjectées dans l’atmosphère par de très grandes éruptions volcaniques peut avoir un impact sur le climat à long terme.
Les glissements de flancs (avalanches de débris)
Les avalanches de débris sont des phénomènes cataclysmiques de grande ampleur au cours desquels une grande partie d’un flanc d’un édifice volcanique (voire un flanc entier) s’effondre sous son propre poids, provoquant un gigantesque glissement de terrain.
Cet aléa a été observé « en direct » pour la première fois en 1980 au Mont Saint Helens (USA), où le volcan a perdu 400 m d’altitude en quelques secondes, produisant une avalanche de roches de 2,5 km3 qui a dévasté une large zone.
De nombreuses études ont depuis montré que ce genre de phénomène était assez commun à l’échelle des temps géologiques sur la plupart des volcans de la planète, qui alternent entre des phases de construction progressives (au gré des éruptions) et des phases de destruction brutales.
Ces avalanches de débris peuvent se former selon différents mécanismes (remontée d’une poche de magma qui fragilise l’édifice, présence d’un système hydrothermal qui fragilise le volcan, violent séisme, etc.) et peuvent avoir lieu indépendamment au cours d’une éruption ou lors d’une phase de repos. Des glissements de terrain plus classiques peuvent aussi affecter l’ensemble des reliefs volcaniques, qu’ils soient actifs ou non, et provoquer ainsi des dommages importants sur des enjeux variés.
Les impacts potentiels associés à cet aléa sont les mêmes que ceux concernant les mouvements de terrain non-volcaniques. Les dégâts vont dépendre en grande partie de l’ampleur et de la magnitude du phénomène (volumes de matériaux affectés par le glissement). Les avalanches de débris volcaniques peuvent former des dépôts très épais (parfois de plus de 100 m d’épaisseur) constitués d’un mélange chaotique de fragments volcaniques très hétérogènes, que ce soit dans leur nature ou leur taille (de quelques millimètres à plusieurs dizaines de mètres de diamètre). Ces dépôts ont la capacité de remodeler entièrement un paysage, et le pouvoir de destruction des avalanches de débris est extrêmement important.
Les tsunamis « volcaniques »
Les tsunamis sont des trains d’ondes se déplaçant dans l’eau (mer, lac, etc.) sur des milliers de kilomètres, et qui forment à l’approche de la côte des vagues pouvant atteindre des dizaines de mètres de hauteur, capables de se propager loin dans les terres. Les tsunamis les plus dévastateurs de ces dernières années sont d’origine tectonique, c'est-à-dire provoqués par un séisme lié au mouvement des plaques tectoniques. Cependant, certains phénomènes volcaniques sont aussi capables de provoquer des tsunamis :
- les explosions provenant d’éruptions sous-marines ;
- l’entrée brutale dans l’eau de grandes quantité de matériel volcanique (coulées pyroclastiques, lahars ou d’avalanches de débris) ;
- les séismes volcano-tectoniques (produits par l’activité du volcan) ;
- l’effondrement partiel d’une partie d’un édifice volcanique (situé à terre ou sous-marin) ;
- la formation en mer d’une caldera (une structure provoquée par l’effondrement du toit de la chambre magmatique d’un volcan après un vidage rapide du magma au cours d’une éruption importante) ;
- la propagation sur une surface liquide d’une onde de choc atmosphérique liée à une forte explosion volcanique.
Les tsunamis d’origine volcanique peuvent produire les mêmes dégâts sur les côtes que les tsunamis non-volcaniques. Les dépôts de tsunamis volcaniques sont difficilement différenciables des dépôts de tsunamis classiques, surtout si la vague a voyagé loin de la source volcanique.
Exposition du territoire
Le territoire français n’est pas à l’abri du risque volcanique, en particulier en Outre-mer. Il peut être exposé à trois types de menaces principales :
- une menace directe et actuelle en Outre-mer, qui compte actuellement au moins quatre volcans actifs : Le Piton de la Fournaise à La Réunion, la Montagne Pelée en Martinique, La Soufrière de Guadeloupe et le volcan sous-marin Fani Maoré récemment formé proche de Mayotte ;
- une menace latente sur les parties du territoire national possédant des volcans ayant probablement eu une activité récente et/ou considérés comme en sommeil (ou « endormis ») : la Polynésie, les Terres Australes et Antarctiques Françaises et l’Auvergne ;
- une menace distante, provenant de volcans situés à l’étranger mais pouvant avoir des impacts sur l’ensemble du territoire national (hexagonal ou en Outre-Mer).
Certains contextes géologiques sont particulièrement favorables au volcanisme :
- les zones de subduction, qui correspondent aux zones où les plaques tectoniques s’affrontent et où l’une d’entre elles s’enfonce sous l’autre. Ce volcanisme se situe ainsi aux frontières entre deux plaques (exemple : Ceinture de Feu du Pacifique, Antilles) ;
- les zones dites de point chaud, qui correspondent à l’expression en surface de grands panaches mantelliques (profonds), globalement considérés fixes par rapport aux mouvements des plaques tectoniques. Ce volcanisme se situe donc au cœur des plaques, et forme généralement une trace volcanique matérialisant le déplacement de la plaque au-dessus du point chaud (exemple : Hawaï, Ile de La Réunion) ;
- les zones d’extension intra-plaques, qui correspondent aux endroits où la croûte terrestre est étirée par les contraintes tectoniques (phénomène de rifting), permettant parfois le développement d’une activité volcanique (exemples : Rift Est Africain, Auvergne, vraisemblablement la région de Mayotte, …).
Ces contextes géologiques et géographiques très différents se traduisent par des volcans aux comportements variés, mais aussi à une forte hétérogénéité des enjeux et de leur vulnérabilité.
4 volcans actifs sont situés sur le territoire français
Le Piton de la Fournaise (La Réunion)
Le Piton de la Fournaise est sous la surveillance de L'Observatoire Volcanologique du Piton de La Fournaise (OVPF), station qui dépend de l'Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP).
La Soufrière (Guadeloupe)
La Soufrière de Guadeloupe est sous la surveillance de L'Observatoire Volcanologique et Sismologique de la Guadeloupe (OVSG), station qui dépend de l'Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP).
La Montagne Pelée (Martinique)
La Montagne Pelée est sous la surveillance de L'Observatoire Volcanologique et Sismologique de la Martinique (OVSM), station qui dépend de l'Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP).
Fani Maoré (Mayotte)
Une crise sismo-volcanique a débuté en 2018 à Mayotte, lorsqu’un un essaim de séismes localisé à une cinquantaine de kilomètres à l’Est de l’île a été enregistré à partir du mois de mai. Le mardi 15 mai à 18h48 heure locale, la plus forte secousse jamais enregistrée dans l’archipel des Comores a été détectée : elle a atteint une magnitude 5.8 et a été très largement ressentie sur l’ensemble du territoire de Mayotte ainsi que dans d’autres îles de l’archipel des Comores.
Afin de répondre aux inquiétudes des autorités et des mahorais, des opérations d’observation et de recherche, menées par plusieurs établissements et laboratoires de recherche français (IPGP/CNRS/BRGM/IFREMER/IPGS) ont mené à la découverte lors d’une campagne en mer d’un nouveau volcan sous-marin de 5 km de diamètre et de plus 800 m de hauteur, situé par 3 500 m de fond à 50 km au large de Mayotte. Un panache volcanique sous-marin de près de 2 km de hauteur sortait alors du sommet de ce relief. Ce nouveau volcan a depuis été dénommé Fani Maoré. Ce volcan sous-marin Fani Maoré est sous la surveillance du Réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte (REVOSIMA), opéré par différents organismes (IPGP-BRGM-IFREMER-CNRS).
La zone Pacifique
La Polynésie française est formée d’un grand nombre d’archipels et de chapelets d’îles dispersées dans le Pacifique, pour la plupart d’origine volcanique et formées par l’activité de points chauds. Le nombre exact de points chauds et le fonctionnement détaillé des différents alignements volcaniques est encore débattu.
Certaines îles de la Polynésie française présentent toutes les caractéristiques de volcans récents, notamment l’île de Mehetia, qui est la partie émergée d’un relief volcanique qui repose par 4 200 m de fond.
D’autres volcans sous-marins, situés dans la Zone économique exclusive (ZEE) de Wallis et Futuna semblent aussi présenter des signes évidents d’activité récente, comme par exemple le Volcan Kulo Lasi découvert en 2010 par 1 200 m de fond au cours de la campagne Futuna de l’Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER).
Les Terres Australes et Antarctiques françaises (TAAF)
Les TAAF sont composées d’un nombre important d’îles, dont la plupart sont d’origine volcanique. L’archipel des Kerguelen, dont l’île principale qui a une superficie comparable à la Corse, en rassemble une bonne partie.
Les Kerguelen résultent d’un magmatisme mixte généré conjointement par un point chaud et par l’activité d’une ride océanique. La majeure partie du volcanisme des Kerguelen semble être ancienne mais des édifices ont été datés de seulement 26 000 ans.
De plus, des indices de terrain (dépôts de lahars récents, niveau cendreux, morphologies de certaines coulées de lave, et présence de fumerolles) semblent indiquer qu’un volcanisme récent a probablement eu lieu sur l’archipel, et que de futures éruptions sont ainsi sans doute possibles. Un nombre assez important de reliefs volcaniques possède en outre des caractéristiques qui permettent de penser qu’ils ont été le siège d’une activité volcanique « récente », notamment :
- l’île de Saint Paul (dernière éruption probable en 1793) ;
- l’île d’Amsterdam ;
- l’île de l’Est dans l’archipel de Crozet ;
- l’île de la Possession, à l’ouest de l’île de l’Est dans l’archipel de Crozet ;
- l’île aux Cochons.
Même en l’absence d’éruption, les reliefs volcaniques escarpés des Kerguelen ou de certaines îles des TAAF peuvent se déstabiliser et engendrer des tsunamis capables par exemple d’impacter l’Australie. Ce risque a été pris en compte et modélisé par le service géologique australien (Geosciences Australia).
Volcans étrangers
Certaines éruptions de volcans situés à l’étranger peuvent avoir des impacts sur le territoire national, qui est alors exposé aux aléas touchant des zones distantes (tels que les cendres et gaz émis dans l’atmosphère ou les tsunamis). La France hexagonale est située à une relative "proximité" (< 2 000 km) de volcans actifs, localisés notamment :
- en Italie (ex : Vésuve, Champs Phlégréens, Etna, îles Eoliennes) ;
- en Islande (ex : Hekla, Katla, Grimsvotn, Eyjafjallajökull) ;
- aux Açores, Portugal (ex : Pico, Fayal) ;
- aux Canaries, Espagne (ex : Teide) ;
- en Grèce (ex : Santorin).
Ces édifices sont pour certains capables de produire de fortes éruptions et/ou de grandes quantités de cendres, dont la trajectoire précise dépendra des vents dominants.
Ce fut par exemple le cas en 2010 lors de l’éruption du volcan islandais Eyjafjallajökull : des cendres fines produites par une importante activité phréato-magmatique explosive ont été transportées par les vents sur une grande partie de l’Europe de l’Ouest. Le trafic aérien y a alors été fortement perturbé.
Pour ce qui concerne l’aviation civile, les nuages de cendres sont surveillés par les VAACs (Volcanic Ash Advisory Centers) de l’OIAC (Organisation Internationale de l’Aviation Civile). Le VAAC en charge de l’espace aérien couvrant la France métropolitaine (ainsi qu'une grande partie de l'Eurasie et l'Afrique) est basé à Toulouse, et est géré par Météo France.
De la même manière que l’hexagone, les territoires d’outre-mer peuvent être impactés par des volcans situés à l’étranger, notamment :
- des volcans antillais voisins de la Martinique et de la Guadeloupe, tels que ceux de Soufrière Hills à Montserrat (comme ça a été le cas à plusieurs reprises depuis 1995 avec des épisodes de retombées de cendres et des tsunamis), de la Soufrière à St Vincent, ou de la Dominique. Près de 20 volcans sont considérés comme actifs dans les Petites Antilles, dont une petite dizaine a connu une activité volcanique depuis 1635 ;
- des volcans d’Amérique centrale et/ou latine pour la Guyane et les Antilles ;
- du volcan actif du Karthala (Union des Comores) pour Mayotte ;
- des volcans du Vanuatu, des Fidji, voire de la Nouvelle-Zélande pour la zone Pacifique.
En plus des panaches de cendres produits lors d’éruptions volcaniques évoqués plus haut, des glissements de terrain ou des effondrements de flancs d’îles volcaniques peuvent provoquer des tsunamis, même hors période éruptive, qui sont capables de toucher l’ensemble des littoraux français en fonction du lieu où est généré le tsunami (Atlantique, Méditerranée, Caraïbes, Pacifique, etc.).
Règlementation
Le risque sismique est très localisé sur le territoire français et ne concerne qu’un nombre limité de communes. Ainsi aucune réglementation nationale n’a à ce jour été publiée concernant la prévention de ce risque pour les bâtiments ou les citoyens. En revanche des dispositions locales existent.
Ainsi, l’article D563-9 du code de l’environnement présente sous forme de tableau la liste des communes particulièrement exposées à un risque d’éruption volcanique où sont applicables les dispositions des articles R. 125-9 à R. 125-14 relatives à la prévention du risque (information et prévention des citoyens).
En terme d’aménagement l’outil réglementaire est le plan de prévention des risques naturels (PPRN). Ils ont pour objet de règlementer la construction et l’aménagement en tenant compte des risques spécifiques à un phénomène. Des cartes d’aléa pour certains des principaux aléas volcaniques ont été élaborées et définissent des zones menacées, de manière à prendre les mesures d’aménagement adéquates.
Les PPRN sont prescrits par le préfet pour les communes à risques qui se situent exclusivement en outre-mer. Des PPRN ont été prescrits et approuvés pour la totalité des communes de Martinique, Guadeloupe et de la Réunion et sont en cours de finalisation à Mayotte. Aucun PPRN prescrit pour des communes hexagonales n’intègre spécifiquement le risque volcanique.
Par ailleurs en outre-mer le risque volcanique est intégré dans des PPRN avec d’autres risques (mouvements de terrain, séismes, …) et il n’existe pas de PPR spécifiquement dédié à ce risque comme cela peut être le cas pour d’autres périls (inondation par exemple).
La prévention contre les risques volcaniques passe par une amélioration de notre connaissance des volcans afin de mieux évaluer l'aléa, et par le développement des moyens de surveillance pour détecter les signes annonciateurs des éruptions. Elle s'appuie aussi sur la capacité des sociétés à anticiper les situations de crise, sur la réduction des vulnérabilités et sur l'information préventive des populations.
L'étude de l'histoire des volcans
Afin de mieux connaître un volcan et de savoir ce dont il est capable, il est essentiel d’étudier ses éruptions passées, qui sont enregistrées dans les couches géologiques et les dépôts éruptifs qui constituent le volcan lui-même. Ces études permettent aux scientifiques de mieux comprendre son fonctionnement, son histoire, les différents types d’éruptions possibles, et aident ainsi à estimer quels seront les aléas susceptibles de survenir en cas de nouvelle éruption.
Lorsque les données existantes sur un volcan en particulier sont insuffisantes, l’étude et l’analyse d’autres volcans du même type ailleurs dans le monde est aussi souvent un bon moyen d'améliorer nos connaissances.
Les témoignages de la population lors des éruptions passées permettent également de mieux comprendre les phénomènes.
Les réseaux de surveillance
Les éruptions volcaniques sont généralement précédées de précurseurs plus ou moins faciles à reconnaître et interpréter, qui traduisent les modifications et réajustement de l’édifice au cours de la remontée du magma vers la surface. Ces modifications peuvent notamment produire des séismes, des déformations de l’édifice, une modification de la température et de la chimie des gaz et/ou du système hydrothermal, ainsi que d’autres signaux géophysiques (magnétiques, gravimétriques, électriques, etc.).
Il est ainsi essentiel de disposer de réseaux de surveillance multi-méthodes multi-échelles robustes autour des volcans, afin de permettre aux scientifiques d’enregistrer des signes de réveil potentiel, et de prévenir à temps les autorités et les populations. Par exemple, à Mayotte, s’agissant d’un volcan sous-marin, les techniques de surveillance sont adaptées en conséquence et différentes de celles appliquées aux volcans terrestres comme ceux de la Martinique, la Guadeloupe ou la Réunion.
Actions de prévention
Face aux phénomènes généralement destructeurs et incontrôlables des éruptions, la seule solution pour préserver les populations est souvent l'évacuation préventive des zones menacées. Cela suppose l’anticipation des phénomènes et nécessite la publication de carte d'aléas (définissant les zones menacées) et de plans d'évacuations, en lien avec une surveillance instrumentale permanente qui détectera les signes précurseurs d’éruption. Les autres actions de prévention concernent :
- la préparation de plans de secours, d'évacuation, et d’organisation de la vie pendant une éruption, en lien entre services de l’Etat, collectivités et citoyens ;
- un aménagement du territoire volontariste, pour limiter l'exposition des populations et des biens, et éviter tout dysfonctionnement majeurs en cas d’éruption de moyenne ou longue durée ;
- une sensibilisation et une information régulière de la population.
Dispositifs de protection et de préparation aux situations critiques
L’organisation des observatoires volcanologiques et de la sécurité civile a pour but d’anticiper la survenue d’une éruption volcanique avec un délai qui doit permettre d’organiser l’évacuation des zones à risque et ainsi assurer la sécurité de la population. Les politiques de réduction des risques reposent donc essentiellement sur la surveillance scientifique, l’évacuation et la résilience des systèmes et des organisations.
Des dispositions spécifiques opérationnelles ORSEC (Organisation de la SEcurité Civile) ont été mis en place par la loi.
Il s’agit de documents établis par la préfecture (SIDPC – Service Interministériel de Défense et de Protection Civile). Ils ont pour objectif de prévoir les mesures de protection des populations à mettre en œuvre en cas d’activité volcanique dangereuse et les rôles de chacun des acteurs de la gestion de crise. Ils prévoient une phase de vigilance, de pré-alerte et d’alerte.
La Réunion, la Martinique et la Guadeloupe ont élaboré leurs dispositions spécifiques opérationnelles ORSEC en lien avec l’activité volcanique sur le territoire, sur la base des anciens Plans de Secours Spécialisé (P.S.S.). La prise en compte des risques volcaniques se fait donc, pour ces territoires, au niveau de la gestion de crise et de l’organisation des secours. Le schéma ci-dessus est un exemple correspondant au plan Orsec de Guadeloupe.